Article Ouest -France 8 novembre 2011

En Normandie, Michel Sardou s’adoucit

mardi 08 novembre 2011
  • Michel Sardou dans le parc de son manoir en Normandie, à quelques kilomètres de Deauville.

    Michel Sardou dans le parc de son manoir en Normandie, à quelques kilomètres de Deauville.

    Photo : David ADEMAS.

Depuis un peu plus d’un an, Michel Sardou vit en partie en Normandie, où il nousra reçus. Pour parler de lui, de ses chansons, de politique aussi. La star de 64 ans jette un  regard de sage sur ses provocations de jeunesse. Et revisite ses tubes, dont il prépare une compilation réarrangée au son d’aujourd’hui. Avant une nouvelle tournée de ses « grands moments ».

« Ah oui, je suis carrément Normand aujourd’hui. Si j’ai un appartement parisien, ici c’est ma résidence principale. » Ici, c’est très joli… Un petit manoir du XVIe siècle, dans un village bucolique près de Deauville, au milieu d’un parc où coule une rivière, avec des dépendances, dont un antique pressoir. « Patrick Modiano, un ami, m’a dit qu’il m’écrirait l’histoire du lieu. » Avec le style Modiano, cela pourrait donner un petit livre très prisé…Ce havre de paix, le chanteur l’a trouvé l’an dernier. Il se promenait par là, avec sa femme Anne-Marie Périer, ancienne rédactrice en chef du magazine Elle. Le couple passe devant la société immobilière qui avait vendu, des années auparavant, la maison du père d’Anne-Marie, l’acteur François Périer. « Ce manoir se situait à 150 mètres derrière la demeure où j’avais vécu », raconte-t-elle. Coup de coeur.

Après la Corse, après Megève, notre Sardou national devient Normand. Pas prêt de partir, dit-il, malgré ses fréquentes envies de déménagement : « Comme Aznavour. On a déménagé 27 fois chacun, je crois. J’ai même eu une maison à Miami, une connerie ! »

Le chanteur a connu plusieurs époques, dont une fin des années 1970 agitée, avec des manifestations anti-Sardou… Il avoue l’avoir bien cherché. Après tout, Le temps des colonies ou Je suis pour étaient particulièrement réac’… « J’ai été un chanteur engagé, mais il y a longtemps. Comme ça a marqué, ça me suit comme un tatouage. À l’époque, je faisais exprès de tendre le bâton pour me faire battre. Je n’ai pas toujours été un type super-clean. Il fallait me faire une personnalité. »

Vous en profitez pour lui demander s’il enlèverait quelque chose à sa carrière s’il en avait le pouvoir ? « Je ne referais pas Je suis pour. » Il re-précise qu’il n’y chante pas un texte en faveur de la peine de mort, mais plutôt sur la loi du talion. « Ces vieilles provocations, c’est fini. D’autant que je ne suis plus du tout pour. Je suis convaincu que la peine de mort n’est pas dissuasive. »

Il allume une nouvelle cigarette. Nous sommes dans une petite pièce du manoir, son bar, « pour deux personnes ». Avec deux fauteuils coincés entre une bibliothèque fournie et un plateau d’une bonne cinquantaine de bouteilles, dont une collection de whisky à saouler n’importe quel amateur.

« Mes succès, je n’y croyais pas ! »

On s’attendait à rencontrer un homme bougon, un peu renfrogné. On se retrouve à papoter avec quelqu’un qui aborde chaque sujet tranquillement, sans se défausser. « J’ai chanté des textes durs. Mais ce sont des personnages qu’on joue, des scénarios, des sketches. Je suis une autre personne. »

Une autre personne, prête à voter à gauche selon des propos récents ? Il sourit, s’amuse du mini-tapage médiatique qui a suivi cette déclaration. Et nuance : « J’ai surtout dit que je ne voterai plus les yeux fermés. Tenez, la primaire socialiste, je l’ai trouvée remarquable. Quant à la réplique UMP, elle m’a fait éteindre la télé J’ai perdu confiance en Sarkozy. Maintenant, j’écouterai tout le monde. » Et il raconte que, s’il a toujours penché à droite, c’est aussi parce que son père, devant sa télé, écoutait De Gaulle debout ! Si cette figure paternelle avait été mineur à Longwy, en bon fils, il aurait sûrement été « communiste »

Le 15 novembre, Michel Sardou recevra, à l’ambassade d’Irlande à Paris, la Clé du Connemara pour les trente ans d’une chanson qui a fait une promotion inespérée pour cette région. Et puisque les tubes naissent parfois d’un rien, celui-ci est inspiré d’un guide touristique sur l’Irlande, alors que lui imaginait une musique à base de cornemuses. « Savez-vous que mes grands succès, je ne voulais pas les sortir. Je n’y croyais pas ! »

Pour Les lacs du Connemara, il pensait que l’histoire d’un mariage irlandais sur sept minutes, ça n’intéresserait personne. Aujourd’hui, c’est l’une de ses préférées. Avec L’an 1000. Les bals populaires ? Elle ne lui plaisait pas. La maladie d’amour ? Écrite dans la douleur. « Nous avions la musique, mais aucun mot ne collait. Et on a trouvé ‘Elle court, elle court…’ »

Par contre, Le France, ça n’a pas traîné. En une nuit. « Mon parolier Pierre Delanoë m’avait laissé un mot : Je suis Le France, pas la France, démerde-toi » On connaît la suite. « Chanter Le France à Saint-Nazaire est l’un des grands moments de ma carrière. Un bonheur fou. J’ai cru que les spectateurs allaient partir à la nage chercher le paquebot… »

Michel TROADEC.
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